Dans le paysage actuel du private equity, où les structures de fonds sont de plus en plus complexes et les investisseurs plus exigeants que jamais, la précision et la clarté des indicateurs de performance sont essentielles. Les asset managers doivent non seulement générer des rendements, mais aussi les communiquer de manière défendable et rigoureuse. C’est là que le MOIC (Multiple on Invested Capital) et l’IRR (Internal Rate of Return) deviennent des indicateurs stratégiques.
Comprendre le MOIC : Simplicité, atouts et idées reçues
Qu'est-ce que le MOIC ? Formule et interprétation
Le MOIC représente la valeur des actifs détenus ou revendus, divisée par le capital initialement investi. C’est une mesure simple du multiple de capital, sans prise en compte du facteur temps. Par exemple, un MOIC de 2,0x signifie que l’investissement a doublé en valeur nominale ; un MOIC de 1,5x indique un bénéfice de 50 % sur le capital investi.
Quand le MOIC apporte-t-il une vraie valeur aux gérants et aux LPs ?
Le MOIC est particulièrement utile pour suivre les investissements early-stage lorsque les sorties ne sont pas encore réalisées, si bien que les indicateurs basés sur le temps comme l’IRR sont moins pertinents. Sa simplicité en fait un indicateur privilégié dans rapports trimestriels, où la transparence prime. Le MOIC est aussi utile pour comparer des investissements avec des durées de détention similaires, comme deux deals venture sortis après 5 ans.
Les limites du MOIC dans les stratégies sensibles au temps
Cependant, le MOIC ne prend pas en compte la valeur temps de l’argent, ce qui peut biaiser les comparaisons. Un MOIC de 2,0x sur 3 ans est bien plus performant que ce même MOIC sur 10 ans. C’est pourquoi, dans les stratégies à durée courte ou à rotation rapide comme le venture debt ou le credit underwriting, l’IRR offre une mesure plus pertinente.
Décrypter l’IRR : des rendements annualisés et une complexité de modélisation
Qu’est-ce que l’IRR et comment le calcule-t-on ?
L’IRR est le taux de rendement annualisé qui annule la valeur actuelle nette (VAN) de tous les flux de trésorerie (entrants et sortants). Contrairement au MOIC, l’IRR prend en compte à la fois le montant et le calendrier des flux de trésorerie, ce qui en fait un indicateur dynamique mais complexe. Il permet notamment de comparer des investissements de durées différentes, comme une opération growth de 2 ans et un buyout de 7 ans. Il reflète aussi la vitesse des rendements, souvent clé pour les LPs.
Pourquoi l’IRR reste la référence, malgré ses biais
L’IRR est largement utilisé pour mesurer la performance des investissements en Private Equity. Pourtant, cet indicateur présente plusieurs limites souvent sous-estimées. Il repose sur l’hypothèse que les flux intermédiaires sont réinvestis au même taux, ce qui est rarement le cas. Il est également très sensible au calendrier des flux : un simple décalage dans une distribution peut significativement modifier l’IRR. De plus, il peut prêter à confusion : un fonds affichant un IRR de 25 % peut paraître surperformant, mais s’il repose sur quelques petites sorties rapides, le MOIC peut révéler une performance bien plus modeste.
Des distorsions fréquentes et des hypothèses implicites
L’IRR intègre des hypothèses fortes, souvent éloignées des réalités de terrain. Le postulat de réinvestissement à rendement constant n’est pas toujours applicable, surtout dans un contexte de taux volatils. Son extrême sensibilité au timing rend l’IRR particulièrement instable dans les premiers stades de vie d’un fonds, où peu de données sont disponibles. À l’échelle d’un portefeuille, sans méthode de consolidation rigoureuse, l’agrégation des IRR peut générer beaucoup de confusion.
MOIC vs IRR : choisir le bon KPI selon la stratégie
Venture capital vs growth equity : pertinence selon le cycle
Dans le venture capital, où les déploiements sont progressifs et les sorties aléatoires, le MOIC domine souvent en début de vie du fonds. L’IRR devient pertinent à mesure que le fonds mature et que les événements de liquidité redessinent le profil de rendement. En revanche, dans le growth equity, avec des durées de détention plus courtes et des sorties planifiées, l’IRR s’impose plus tôt comme la référence.
Comment le timing, les sorties et la liquidité influencent le choix
Pour les actifs illiquides ou à horizon long terme comme les infrastructures ou les buyouts, le MOIC offre une vision plus simple des avancées. En revanche, les deals courts comme les fonds secondaires ou de dette privée tirent parti de l’IRR pour mesurer la vitesse de création de valeur. La bonne pratique reste d’utiliser les deux : le MOIC pour la valeur absolue, l’IRR pour l’efficacité temporelle.
FAQs
Quel indicateur est le plus pertinent : MOIC ou IRR ?
Tout dépend du contexte d’analyse et de la stratégie d’investissement. Le MOIC, simple à calculer et à interpréter, est souvent privilégié pour mesurer la performance globale d’un investissement sur le long terme. L’IRR, en revanche, intègre la temporalité des flux de trésorerie et met en lumière la vitesse de retour sur investissement.
Le MOIC peut-il induire en erreur ?
Oui. Le MOIC ne prend pas en compte le temps, donc un 2,0x sur 2 ans est traité comme sur 10 ans. L’IRR est plus adapté aux stratégies de durée courte.
Comment les LPs lisent-ils le MOIC vs. l’IRR en levée de fonds ?
Ils utilisent souvent les deux. Le MOIC donne une vision globale des multiples, l’IRR aide à apprécier la vitesse des distributions. Les LPs attendent généralement les deux.
Faut-il prioriser le MOIC ou l’IRR dans les reportings ?
Utilisez le MOIC pour les gains non réalisés ou early-stage, et l’IRR pour les fonds matures. Le MOIC montre la performance absolue, l’IRR montre l’efficacité. La combinaison est aujourd’hui la norme.